Les phylloxères au sein du Jardin botanique de Montréal

Les phylloxères au sein du Jardin botanique de Montréal

Khalil ABAS

Caryer ovale (photo prise par Khalil Abas à l’arboretum du Jardin botanique de Montréal)

 

Cet été, plusieurs espèces d’insectes gallicoles du genre Phylloxera ont été retrouvées dans l’arboretum du Jardin botanique de Montréal. Ce type d’insecte est cousin des pucerons et tout comme eux ils sont des parasites des plantes, se nourrissant de leur sève. En juin, une infestation sévère a été constatée sur les caryers ovales (Carya ovata) de la collection. Au Jardin botanique, nous avons trouvé au moins cinq espèces de phylloxères sur le même arbre.

 

 

 

 

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Des galles sont présentes sur diverses parties de la plante (photo prise par Khalil Abas à l’arboretum du Jardin botanique de Montréal)

Jusqu’à tout récemment ce type d’insecte avait peu capté l’attention des scientifiques. Le dernier traitement datant du début du 20e siècle. Des travaux sont maintenant en cours au Laboratoire Favret pour collecter davantage d’informations sur ces insectes fascinants. Il y a une soixantaine d’espèces connues et un certain nombre à être découvert, avec plus de la moitié rapportée sur les caryers d’Amérique du Nord, type d’arbre plus répandu aux États-Unis et groupe qui inclus le pacanier.

 

Un manque d’information est dû au fait que bien que les phylloxères attaquent des plantes utilisées pour l’alimentation de l’être humain (par ex. le pacanier), normalement elles n’ont pas d’impact économique significatif. Cependant, un phylloxère a donné du fil à retordre aux agriculteurs : le phylloxère de la vigne, Daktulosphaira vitifoliae, qui a ravagé les vignobles européens à la fin début du 19e siècle par son introduction accidentelle sur le vieux continent.

 

Identification :

Bien que ce soient de tout petits insectes (~1 mm de longueur!) on peut facilement reconnaitre les galles qu’ils induisent sur les plantes. Les galles sont des excroissances qui peuvent apparaitre sur diverses parties d’une plante (feuilles, pétioles, rameaux, etc.). C’est la maison des phylloxères : ils y passent presque toute leur vie cachés à l’intérieur, protégés des prédateurs, à se nourrir de la sève de la plante. Puisqu’ils passent la majorité de leur existence à l’intérieur de la plante, on dit que ce sont des insectes endophages.

Une galle renfermant des phylloxères (photo prise par Khalil Abas au laboratoire Favret)

Les phylloxères forment une grande variété de galles, d’apparence très diverse selon chaque espèce. Ainsi, l’apparence de la galle est la meilleure façon d’identifier l’espèce sur le terrain, en plus de la plante hôte. En effet, les phylloxères sont des parasites spécialisés, chaque espèce attaquant un nombre restreint de plantes. On peut voir sur la photo ci-jointe trois galles d’apparences diverses sur une feuille de caryer ovale.

Trois types de galles sont présentes sur la même feuille d’un caryer ovale (photo prise par Khalil Abas au laboratoire Favret)

 

Cycle de vie :

Le cycle de vie des espèces appartenant au genre Phylloxera est très complexe et analogue à celui de leurs cousins les pucerons. Il varie selon les espèces, mais l’exemple qui suit est représentatif.

Au début du printemps, quand les bourgeons commencent à s’ouvrir, l’œuf contenant la fondatrice de la colonie éclore. Celle-ci choisit un emplacement sur la plante hôte pour induire une galle, qui ne peut se former que sur les parties en croissance. Lorsque la galle se referme sur elle, la fondatrice commence à se reproduire. Mais cette reproduction est asexuée : les œufs dont elle remplit la cavité de la galle contiennent des clones d’elle-même. C’est ce qu’on appelle la parthénogenèse, et tous ses descendants auront le même code génétique que leur mère.

Une fondatrice entourée de ses œufs bien à l’abris dans sa galle (photo prise par Colin Favret au laboratoire Favret)
Des phylloxères à différents stades de développement dans une même galle. Êtes-vous capable de repérer la fondatrice? (photo prise par Khalil Abas au laboratoire Favret)

Après éclosion, les larves passeront par quatre stades de développement pour devenir des adultes ailés, qui ont une apparence différente de leur mère. Leur développement se déroulera bien à l’abri de leur galle, où ils passeront leur temps à se nourrir de la sève de la plante hôte. Après deux à trois semaines, lorsque leurs ailes auront bien poussées, la galle s’ouvrira d’elle-même pour que les ailés puissent s’envoler à la recherche d’une autre plante hôte. Ils y déposeront des œufs encore par parthénogenèse. Mais ceux-ci donneront cette fois des individus sexués, mâles et femelles qui, après reproduction sexuée, iront pondre un œuf qui restera dormant jusqu’au printemps prochain, pour éclore et donner une autre fondatrice.

Un ailé pondant des œufs sur une nouvelle plante hôte (photo prise par Khalil Abas au laboratoire Favret)

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